MADEMOISELLE OGIN en VOD
- De
- 1962
- 101 mn
- Drame
- Japon
- Tous publics
- VO - HD
PARCE QUE
Le sixième et dernier film de Kinuyo Tanaka est l’adaptation d’un roman signé Tōkō Kon. Ce dernier est le frère du critique littéraire et essayiste japonais Hidemi Kon. Tōkō fut une figure japonaise du mouvement de la littérature prolétarienne, courant né en France dans les années 30, qui s’intéresse aux conditions de vie des prolétaires. Par la suite Tōkō devint moine bouddhiste, avant d’embrayer une carrière politique au parlement japonais. C’est son expérience bouddhiste qui lui inspira la rédaction du livre Mademoiselle Ogin en 1956, qui connaîtra deux adaptations cinématographiques. Celle de Kinuyo Tanaka fut la première en 1962.
À travers cette histoire d’amour impossible entre Ogin-sama et le samouraï Ukon Takayama converti au christianisme, le film de Kinuyo Tanaka rejoint, par son sujet, toute une série d’œuvres ayant trait à l’arrivée du Christianisme au Japon. Une religion dont l’iconographie a marquée bon nombre d’œuvres majeures du 7ème art japonais. De la trilogie Majin au Couvent de la Bête Sacrée. Cependant, Mademoiselle Ogin aborde d’avantage cette question, sous un angle politique et théologique, plus proche des futures adaptations cinématographiques du roman Silence de Shūsaku Endō, dont celle qu’en tirera Martin Scorsese.
La réussite de Mademoiselle Ogin est également à mettre au crédit du Ninjin Club. Une boîte de production créée par les actrices Yoshiko Kuga, Keiko Kishi et Ineko Arima, ayant permis à des cinéastes comme Masaki Kobayashi de conserver leur indépendance face aux studios, et de livrer leurs plus grands films. Tanaka va d’ailleurs emprunter ses nombreux collaborateurs à Kobayashi, qui tourne au même moment son chef-d’œuvre Harakiri : du chef opérateur au directeur artistique, en passant par le légendaire acteur Tatsuya Nakadai. Kobayashi rendra hommage à la réalisatrice en créant un prix à son nom en 1985 dans le cadre des Prix du film Mainichi.
Pour son dernier film en tant que réalisatrice, Kinuyo Tanaka va investir les différents huis clos qui constitue l’ossature narrative de Mademoiselle Ogin pour livrer une œuvre franc-tireuse. Si l’on retrouve l’approche émotionnelle et romantique des précédents long-métrages de Tanaka, Mademoiselle Ogin bifurque vers une ambiance âpre et particulièrement sournoise, culminant dans un climax anxiogène et silencieux. Une incroyable démonstration du talent de Kinuyo Tanaka pour le suspense, qui fait de son ultime long-métrage en tant que réalisatrice, une œuvre radicale et subversive, qui à l’instar de ses autres films, méritent d’être découverts et redécouverts.