RIO GRANDE en VOD
- De
- 1950
- 101 mn
- Guerre / Western
- Etats-Unis
- Tous publics
- VM - HD
PARCE QUE
John Ford est le plus grand réalisateur de western de l’âge classique – titre que personne ne lui dispute, Parce que son œuvre embrasse à la fois tous les sous-ensembles historiques de la Conquête de l’Ouest, toutes les sous-catégories stylistiques du genre, mais aussi toutes les humeurs et les idéologies pouvant toucher à la représentation d’une période délicate dans ses rapports avec l’identité américaine : jovialité va-t’en-guerre (La Chevauchée fantastique), mélancolie des derniers gunslingers à l’aube de la civilisation (L’Homme qui tua Liberty Valance), diabolisation ambiguë des amérindiens (La Prisonnière du désert), réinsertion au récit national et culpabilité réparatrice (Les Cheyennes)...
Dans cette collection de chefs-d’œuvre qui ont tous une singularité saillante, qu’il s’agisse d’action, de sujet, de structure de récit, Rio Grande apparaît à tort comme un opus moins particulier, une sorte de “Ford étalon” où tout est étrangement familier. Comme si le film émanait non pas de sa propre idée mais de celle que l’on se fait des westerns de John Ford : John Wayne est lieutenant de cavalerie, sa patrouille campe au bord du Rio marquant la frontière avec le Mexique, les Apaches rôdent. La situation archétypale se met en mouvement avec l’irruption d’un jeune fils, recalé de l’école d’officiers, engagé comme simple soldat ; puis avec celle de sa mère, décidée à sauver son fils contre la volonté du père, qui refuse de concéder un traitement de faveur, et celle du fils lui-même, résolu à rattraper moralement son échec au péril de sa vie.
Le genre est là dans toute sa majestueuse pureté, c’est-à-dire d’abord comme une pure affaire de lignes et de géométrie : l’empire de l’horizontalité (le fleuve placide, les imposantes mesas, l’interminable plaine, la ligne d’horizon) et la perturbation verticale des activités humaines (irruptions de cavaleries, érections de forts…), le systémisme immuable de l’espace brisé par le souffle de l’Histoire. Il est encore aussi empreint d’une forme de candeur : les hommes sont là certes pour mourir, mais c’est un destin qu’ils acceptent et désirent, tant dans le camp règne une indéfectible camaraderie chaleureuse, qui par magie repousse toujours l’échéance fatale – on mourra demain, d’abord il faut boire et chanter.
L’honneur et l’orgueil, la guerre et la famille, les ennemis et les copains ; un père, un fils, une mère ; un fleuve, un fort, un front. Tout est au nombre de un, comme si le genre-roi d’Hollywood trouvait sa portion congrue, sa forme la plus stricte et parfaite.