LE MANOIR DE LA TERREUR en VOD
- De
- 1981
- 85 mn



- Érotique
- Italie
- Tous publics
- VO - HD
PARCE QUE
Les films de zombie et l’Italie ont une longue histoire commune. Alors que ce sous-genre du cinéma d’horreur connaît un soubresaut à la fin des années 60 outre-Atlantique, loin de la sorcellerie et de ses origines vaudou, grâce à George A. Romero et son film La Nuit des morts-vivants, suivi de tout un tas d’ersatz, c’est le pays de Rossellini, Visconti et Antonioni qui reprend le flambeau au crépuscule des années 70. Au moment où Dario Argento remonte Zombie de Romero pour l’Europe, dans une version plus dynamique et cauchemardesque, Lucio Fulci tourne sa suite non officielle, L’Enfer des zombies, également connu sous son titre original Zombi 2, en lui retirant toute dimension sociale pour n’en conserver que la substantifique moelle horrifique et putride. Dans la foulée, le cinéma bis italien s’empare de la figure du mort-vivant, et c’est dans ce climat euphorique que le réalisateur Andrea Bianchi, connu pour ses oeuvres controversées entre thriller, horreur et érotisme, ajoute sa propre pierre à l’édifice zombiesque : Le Manoir de la terreur.
Ce qui caractérise Le Manoir de la terreur par rapport à ses pairs, c’est son mélange de gore et de scènes de sexe. Les 10 premières minutes du film donnent le ton. Alors qu’un archéologue découvre une mystérieuse relique dans les ruines situées près d’un ancien manoir, puis se fait dévorer par des créatures cannibales surgies des limbes, un groupe d’adultes investit ce même manoir et Bianchi les filme tour à tour en train de copuler, sans fioriture, tandis que la menace se rapproche d’eux, lentement. Le sexe est tellement présent dans le film qu’il donne lieu à des scènes et dialogues hallucinants. Un mari lance à sa femme, sans qu’elle s’en offusque le moins du monde, “Tu as l’air d’une vraie putain, mais c’est comme ça que tu m’excites”, et le plan suivant, un zombie sort de terre, le visage putréfié, ensanglanté, et plein d’insectes. La menace qui s’abat sur les trois couples du film semble résulter, telle une punition, de leur comportement désoeuvré. Une philosophie puritaine que l’on retrouve dans de nombreux slashers américains de l’époque, même si Bianchi, qui tournait également des films pornographiques en parallèle, a surtout trouvé un prétexte pour se livrer à ses deux passions cinématographiques.
L’érotisme ambiant du film tend d’ailleurs au malaise et à la perversité par l’entremise du personnage de Michael, fils de l’élégante Evelyn, jaloux de son beau-père. Incarné par Peter Bark, acteur atteint d’une maladie génétique causant un vieillissement prématuré, Michael a un faciès à la fois étrange et unique en son genre, a mi-chemin entre l’enfant et l’adulte. C’est justement pour ce trouble que Bianchi a casté Bark, alors âgé de 25 ans. Derrière le massacre des convives par la horde de zombies et le sentiment de fin du monde qui naît des dernières images (dont une scène cauchemardesque dans un monastère), la relation ambiguë entre Michael et sa mère est le vrai fil conducteur du Manoir de la terreur. Plus choquantes que les mises à mort sanguinolentes, les deux scènes où Michael agresse sexuellement Evelyn font basculer le film dans une horreur inattendue. Deux scènes miroir, où le fils cherche le sein de sa mère et se comporte comme un amant incestueux. Alors qu’elle le refoule dans un premier temps, Evelyn se donne finalement à son fils, transformé entre-temps en zombie, qui lui rend bien en lui dévorant le sein.
Si Le Manoir de la terreur est un film culte, c’est aussi et surtout pour la qualité de ses maquillages. A des lieux des zombies blafards de Romero, Bianchi se pose comme un disciple de Fulci, avec des morts-vivants en phase de décomposition - superbe travail de Luigino De Rossi, qui avait déjà travaillé sur L’Enfer des zombies. Le cinéaste insiste jusqu’à la nausée sur ses monstres, à travers de nombreux gros plans de leurs mains viciées ou de leurs visages, ou du moins ce qu’il en reste, sur lesquels s'épanouissent de véritables asticots et vers de terre. Les morts sont elles aussi spectaculaires, que ce soit les crânes fendus des zombies, les corps éviscérés des survivants, ou encore, la géniale décapitation de la servante du manoir, rendues immobiles par un clou enfoncé dans sa main gauche, avant que ne s’abatte sur elle une faux rouillée. Bianchi épouse le rythme infernalement lent de ses morts-vivants à travers une mise en scène qui prend un malin plaisir à étirer les meurtres, comme une mécanique fatale se refermant inévitablement sur ses victimes.