LA QUINIELA

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Totalement inconnue en France, mais adulée en Espagne, son pays de naissance, l'actrice Ana Mariscal (1923-1995) est l'une des premières femmes ibérique à avoir été scénariste, productrice et réalisatrice au pays des Pesetas. Après une carrière de comédienne dans les années 40/50 dans des films qui ont rarement dépassés la frontière, elle monte sa propre société de production en 1953 (Bosco Films) où elle réalise son premier long métrage : Segundo Lopez, aventurero urbano, drame urbain sur le chômage, dans la lignée des films néo-réalistes italiens des années 40 comme Rome, ville ouverte ou Voyage en Italie de Roberto Rossellini.

Comme toute acteur ou actrice montant sa propre boîte de production, Ana Mariscal peut se permettre de de tourner ses projets en toute liberté. Et en offrant une perspective féminine à ses personnages de femmes dotées d'une psychologie fine et complexe, en accord avec la réalité sociale de son pays (à savoir l'Espagne des années 50). Parmi ses longs métrages on peut citer El gran Galeoto (1959) sur les conséquences de la jalousie et des malentendus dans une petite communauté, Con la vida hicieron fuego (1959) qui traite des tribulations d'une famille pendant la guerre espagnole, et surtout le plus décontracté La quiniela (1960), une chronique sociale que l'on pourrait rapprocher, dans le ton et l'humour, de la comédie italienne des années 50/60.

On y suit le parcours d'un homme à la vie rangée, Don Candido qui, du jour au lendemain, se lance dans un pari sportif “footballistique” et gagne une somme d'argent conséquente. Une victoire qui le rend accroc aux paris avec une telle obsession que cela perturbe son quotidien, son entourage familial et même son métier d'enseignant. Sous forme de fable ironique, Ana Mariscal construit une satire sociale sur l'obsession des paris et de ses dangers tout en agrémentant son film de personnages secondaires bien croqués : la fille adolescente de Don Candido, accroc à son feuilleton radio romantique, un chauffeur de taxi qui tente vainement de se faire payer sa course, un patron de bar également fasciné par les paris sportifs, et , pour prendre le personnage le plus lucide et stable : la propre femme du patriarche qui tente, en vain, de raisonner son mari.

Sorti en Espagne le 29 août 1960, La Quiniela n'a pas eu l'honneur d'une distribution en France. Il faudra attendre le Festival Lumière 2023 pour que l'œuvre d'Ana Mariscal – peut-être l'équivalente espagnole d'Agnès Varda en France, de Ida Lupino aux États-Unis, de Chantal Akerman en Belgique et de Mai Zetterling en Suède – soit enfin découverte en France, grâce à une restauration d'une partie de ses films par la Filmoteca Española.

Premier (et seul à ce jour) film de cette réalisatrice que je vois grâce au Festival Lumière et que je découvre avec émerveillement.J'y ai suivi avec un grand plaisir les aventures de cette famille de timbrés se vautrant dans la folie des paris sportifs. Ce fourbe de ...