ELLE

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On peut distinguer deux grands courants dans la filmographie de Blake Edwards. Le premier d’inspiration ouvertement burlesque regroupe les films de la série La Panthère rose plus quelques perles comme La Party avec Peter Sellers. L’autre veine, plus mélancolique, fait le lien entre d’autres grands films d’Edwards comme Diamants sur canapé et Le Jour du vin et des roses. Elle, sorti en France début 1980, appartient à une troisième catégorie qui réussit la synthèse des deux premières : un mélange d’humour et d’acidité qui donne tout son prix à cette évocation de la crise de la quarantaine chez un homme qui ne veut pas vieillir.

Comme souvent, Blake Edwards a lui-même écrit le scénario. L’idée lui en est venue sur le tournage de Darling Lili à Bruxelles, en 1969. C’est en effet là qu’il a vu dans une grosse limousine arrêtée à sa hauteur à un feu rouge une superbe femme dont le voile en dentelle laissait penser qu’elle allait se marier. Qui était cette belle inconnue ? Son souvenir et celui du regard qu’elle lui a lancé ce jour-là ont incité Edwards à écrire le personnage de Jenny qui trouble tant le protagoniste. Ce fut le premier grand rôle de Bo Derek au cinéma, rôle qui l’a fait connaître mais qui, initialement, ne lui était pas destiné. Le personnage avait été écrit pour Melanie Griffith. Et quand cette dernière s’est désistée, Kim Basinger a été sollicitée. Bo Derek a tellement frappé les esprits dans ce film que sa coiffure a créé une mode : celle des cheveux tressés en petites nattes fermées par des coquillages et des plumes.

 
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Alors que Blake Edwards était victime d’un passage à vide commercial, le succès de Elle a redoré son blason auprès des pontes de Hollywood qui lui ont permis d’abandonner la saga des Panthère rose pour aborder des œuvres plus personnelles. Par exemple, That’s Life (1986), qu’il a écrit avec son psychanalyste. Les scènes les plus marquantes de Elle ont été maintes fois reprises et pastichées. Comme la course au ralenti de Bo Derek, sur la plage, dans son maillot de bain une pièce jaune. Détail cocasse, alors que le personnage joué par Bo Derek adore faire l’amour sur la musique du Boléro de Ravel, la comédienne a justement décroché le premier rôle du film Boléro en 1984. Pour le reste, on retiendra surtout sa prestation de Jane dans Tarzan, l’homme singe réalisé par son mari John Derek en 1991.

Dans les années 70, le Boléro de Ravel avait déjà été souvent utilisé au cinéma. Mais après le film de Blake Edwards il l’a été plus encore. Et notamment dans Les uns et les autres de Claude Lelouch où ce morceau joue carrément un rôle au sein de l’action en permettant de réunir tous les personnages autour d’un même spectacle à la fin. La musique de Elle comporte par ailleurs plusieurs compositions originales toutes créées par le musicien attitré du cinéaste Henry Mancini, auteur notamment du thème très connu de La Panthère rose.

Blake Edwards venait de dépasser la quarantaine quand il a tourné son film et, sans aller jusqu’à dire qu’il est autobiographique, il rebondit sans nul doute sur des thèmes qui lui sont chers. D’autant que la femme du protagoniste est interprétée par Julie Andrews, la propre épouse de Blake Edwards dans la vie. Ensemble, ils ont tourné une dizaine de fois dont le célèbre Victor, Victoria. Dudley Mooore, qui tient le rôle principal, n’a retrouvé Blake Edwards que sur un autre film Micki et Maude en 1984. Jazzman britannique, il a mené de front une carrière de musicien et de comédien. Quant à la jolie fille qu’il voit au télescope s’ébattre nue chez son voisin, elle n’est autre que Annette Haven, la reine du porno américain des années 70.

George Weber (Dudley Moore) fête ses 42 ans. Il a tout pour être heureux: il est un compositeur de chansons de variétés riche, a une jolie compagne Samantha Taylor (Julie Andrews) qui est une chanteuse, il est plutôt intelligent et drôle . Seulement il n'accepte pas de vieillir ...

"I like to fuck on Prokoviev or Ravel.." Punch line ô combien putassière mais ô combien représentative du personnage de petite bourgeoise hippie incarnée par une Jenny Miles (Bo Derek) minérale et objet de tous les fantasmes d'un George Webber (Dudley Moore) en pleine crise ...

Wah ! revoir ce film après tant d'années fait un bien fou ; je l'avais vu à sa sortie en France en 1980 (bien que sorti en 79 aux Etats-Unis) et d'emblée, j'avais adoré. Je n'ai dû le revoir qu'une seule fois, en VHS, c'est dire si je me suis privé ...