LE VENIN DE LA PEUR

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Un mari avocat qui court les jupons, un papa poule futur député, une épouse frustrée qui passe sa vie chez son psychanalyste à interpréter ses rêves érotiques… Le Venin de la peur prend place dans la haute-bourgeoisie londonienne, dont Lucio Fulci démonte subtilement les rites et les tabous. Un milieu étriqué, où règnent le non-dit et la frustration, qu’avait en horreur le cinéaste italien. Quoi de mieux que du sexe et du sang pour faire exploser l’atmosphère pesante des hautes sphères ? Dans ce film qui joue sur la lisière entre imaginaire et réalité, les fantasmes sexuels et pulsions meurtrières, d’abord imaginés, prennent peu à peu possession du récit.

Le jour, Carol Hammond est une bourgeoise qui s’ennuie royalement. La nuit, elle fait d’intenses rêves érotiques avec sa voisine, Julia Durer, femme libre et délurée qui passe ses nuits à faire des orgies. Entièrement imaginaires, les scènes d’amour entre elles sont particulièrement soignées, filmées dans un décor sombre et imposant. Avec le ventilateur réglé au maximum, la tension érotique est à son summum. L’excellente restauration du film rend honneur à la mise en scène élégante et baroque de Lucio Fulci. La caméra à l’épaule du chef op Luigi Kuveiller et le montage cut et répétitif sont sertis d’une musique typiquement seventies signée du maestro Ennio Morricone.

Surnommé “le maître du gore italien” ou “le poète du macabre”, Lucio Fulci (1927-1996) est un cinéaste qui s’est essayé à de nombreux genres : la comédie, le drame, le récit d’aventure, le western spaghetti, le film policier, le film érotique et enfin le film d’horreur. C’est dans ces deux derniers genres qu’il s’est fait remarquer, avec notamment Perversion Story et sa Trilogie de la mort : L’enfer des zombies, L’au-delà, Frayeurs. Cette exploration des genres cinématographiques se ressent dans Le Venin de la peur, qui est à la fois un giallo érotique, un récit horrifique et une enquête policière, dans lequel imaginaire et réalité se confondent.

Le Venin de la peur est servi par un casting éclectique et 100% multiculturel. Dans le rôle de Carol Hammond, on retrouve la Brésilienne Florinda Bolkan : après un rôle dans Les Damnés (1969), elle joue l’amante de l’inspecteur Gian Maria Volonté dans Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon (1970), et retrouvera Fulci l’année suivante pour La Longue nuit de l’exorcisme. L’actrice suédoise Anita Strindberg interprète la voisine fêtarde, qui enchaînera d’ailleurs les gialli les années suivantes. Remarquable chez Joseph Losey, l’acteur anglais à l’air sévère Stanley Baker incarne l’inspecteur de police. Enfin, le Français Jean Sorel complète le casting, qui, décidément, incarne à la perfection les riches bourgeois ne satisfaisant pas les désirs sexuels de son épouse, quatre ans après Belle de jour. À noter qu’il était déjà dans Perversion Story de Lucio Fulci.