BATMAN, LE DÉFI

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Après avoir tourné, en 1988, le premier volet des aventures de la chauve-souris et engrangé, rien qu’aux Etats-Unis, plus de 250 millions de dollars de recette, Tim Burton fut assidûment courtisé pour réaliser, sans attendre, une suite. Il préféra tout d’abord se concentrer sur une histoire plus intimiste qui lui tenait à cœur : celle d’un garçon aux mains en lames de ciseaux qui devait devenir Edward aux mains d’argent. Le succès colossal de ce film extraordinaire, produit par la Fox car refusé par la Warner, eut comme conséquence que ce studio accepta de donner carte blanche à Burton pour réaliser Batman returns –en français  Batman le défi. De fait, on assiste ici à un festival de méchants, tandis que Batman ne fait que quelques apparitions. Là où le premier film se contentait, pour se mesurer au super héros, du seul Joker, il est vrai incarné avec panache par un Jack Nicholson déchaîné, Batman returns est envahi par le mal… Dans la catégorie « humains, quoique… », Max Shreck, alias Christopher Walken, est un milliardaire véreux, bien décidé à prendre le contrôle de la ville. Sa silhouette et le nom du personnage sont un hommage direct du réalisateur à l’expressionnisme allemand et au comédien Max Schreck, qui immortalisa (si l’on ose dire !) le Nosferatu de Murnau.

Dans la catégorie «animaux humains», le Pingouin, interprété par Danny DeVito est en réalité un riche fils de famille que ses parents ont abandonné à la naissance en raison de sa laideur et de sa difformité, jetant son berceau dans les égouts où il fut recueilli et élevé par les volatiles du zoo.

Quant à Michelle Pfeiffer, elle permet d’évacuer la trop univoque «Batgirl» de service au profit d’un personnage totalement double, Catwoman en costume bondage à la Musidora, qui vit quelques corps à corps musclés avec Batman, tandis que sa version diurne, Selena Kyle, remplit le cahier des charges du flirt léger en compagnie du double gentil de Batman, Bruce Wayne. Ce dernier, interprété pour la deuxième fois par Michael Keaton, dont on retiendra plutôt, chez Tim Burton, sa prestation disjonctée en facétieux Beetlejuice, semble ici un peu falot pour ne pas dire absent. C’est que Tim Burton, comme toute sa filmographie le prouve, de Pee Wee Big Adventure à Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street, n’aime rien tant que les personnages doubles, versatiles, ambivalents, en somme !

 
Dans le même genre vous pouvez trouver SUPERMAN DE RICHARD DONNER, 1979 ou encore BATMAN BEGINS DE CHRISTOPHER NOLAN (2005) .

Tim Burton est né Timothy William Burton le 25 août 1958, à Burbank, Californie. Enfant timide et solitaire, il se gave de films fantastiques de série B et Z et dessine des monstres dans la marge de ses cahiers. Engagé aux Studios Disney en 1979, à l’âge de 21 ans, pour travailler sur Taram et le Chaudron magique, puis Rox et Rouky, il en profite pour réaliser deux courts métrages Vincent (1982) et Frankenweenie (1984), jugés trop sombres par sa direction.

En 1985, il est engagé par la Warner pour mettre en scène les aventures de Pee-Wee, personnage d’enfant adulte créé par l’acteur Paul Reubens. Réalisé en moins d’un mois pour un budget dérisoire, Pee Wee Big Adventure est une affaire plus que rentable à laquelle une suite est, sur le champ, envisagée. Mais Burton préfère passer son tour et s’attaque à un projet qui correspond plus à son univers personnel avec personnage monstrueux, fantômes, et jeune fille suicidaire, ce sera Beetlejuice, qui remporte lui aussi un franc succès et fait de son réalisateur, à la fin des années 1980, l’un des (jeunes) hommes les plus en vue d’Hollywood.

C’est ainsi que le petit garçon de Burbank a réalisé, au sens propre comme au figuré, une bonne partie de ses rêves. Il a tourné avec Vincent Price, son idole (Edward aux mains d’argent) et rencontré son double parfait, Johnny Depp, qu’il a dirigé six fois. Il a marqué de son empreinte les deux «blockbusters» que sont Batman et Batman le défi. Il a réalisé un film à la manière de ceux de la Hammer (Sleepy Hollow - Le Cavalier sans tête), et fait un crochet par la science-fiction façon années 50 (Mars attacks !). Il a rendu hommage à un cinéaste qualifié de plus mauvais de tous les temps (Ed Wood), et rendu grâce à la transmission paternelle dans Big Fish. Il a conté, dans deux longs métrages d’animation, les aventures de Jack Skeletton dans L’Etrange Noël de Monsieur Jack (réalisé par Henry Selick) et celles d’une défunte mariée dans Les Noces funèbres. Il a donné sa version de La Planète des singes, adapté à sa manière le roman pour enfants de Roald Dahl, Charlie et la chocolaterie et même mis en scène un opéra gothique et gore : Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street.

Tous ses films, visuels, outranciers, flamboyants, qu’ils soient de commande ou lui appartiennent en propre, sont marqués par la violence qui fabrique des monstres et l’humanité qui se cache en tout être. Tim Burton, l’homme derrière cette œuvre singulière, n’a pas fini de nous surprendre. 

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