En ce début des années 80, c’est Michel Audiard qui alerte le producteur Alexandre Mnouchkine sur la qualité d’un roman policier qu’il vient de lire : Brain wash de John Wainwright. Le producteur en acquiert les droits et lance la production. Audiard travaille à l’écriture en attelage avec Jean Herman, solide scénariste qui fut cinéaste et qui est sur le point de devenir une pointure de la littérature française sous le nom de Jean Vautrin. Et oui le même Vautrin qui obtiendra un Goncourt en 1989 avec Un grand pas vers le bon Dieu.

Audiard lui n’est plus dans sa période PMU, casquette et bons mots. L’homme est au crépuscule de sa vie, il mourra en 1985 et il ne se remet pas du décès accidentel de son fils ainé François. Son œuvre s’assombrit et Garde à vue est probablement le scénario le plus sobre, le plus tragique et le plus inspiré qu’il ait jamais écrit. Le clown est triste et la mélancolie s’abat sur le film.

Romy Schneider, la solaire Romy, tourne là son avant-dernier film, elle mourra le 29 mai 1982. Michel Serrault, lui, entame son cycle de rôles tragiques. C’est difficile à imaginer mais à l’époque il est encore perçu comme un comique, l’ancien partenaire de Jean Poiret, les rigolos des années 60. Il est troublant de noter que les deux acteurs ont eux aussi accidentellement perdu un enfant pendant cette période. Michel Serrault en 1978 et Romy Schneider quelques mois avant la sortie du film.

Un chef d’œuvre qui dans son sujet même porte le deuil d’enfant assassinés ou victimes des adultes. Ventura y apporte sa rude humanité, alors qu’initialement le rôle avait été prévu pour Yves Montand. Gros succès de 1981 Garde à vue recevra de nombreuses récompenses et notamment quatre césars. Meilleur acteur pour Michel Serrault, meilleur second rôle pour Guy Marchand, meilleur scénario pour Herman et Audiard. On peut dire que dans l’histoire du cinéma français ce film grave met fin à l’insouciance d’une génération dorée.

En mai dans le pass illimite