SUSPECT NUMÉRO UN

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Les faits divers sont parmi les plus grands réservoirs de fiction. Encore plus quand ellles aboutissent à des cas d'erreur judiciaires. Ajoutez-y des opérations policières qui tournent mal et transforment des quidams en victime, et vous aurez les ingrédients idéaux pour rédiger un scénario de film. 

Suspect Numéro 1 a décroché ce gros lot avec le cas d'Alain Olivier, un toxicomane embarqué malgré lui dans un montage de la GRC, la Gendarmerie royale du Canada, l'ayant mené à un emprisonnement de près de huit ans dans une prison thaïlandaise. 

A partir de l'enquête fouillée d'un journaliste convaincu de l'innocence d'Olivier, Daniel Roby tisse les fils d'un thriller carcéral. A l'image d'une mission d'infiltration qui a mal tourné, Suspect Numéro 1 pousse les codes du film de prison vers une démonstration des dérives du système policier et judiciaire canadien. Les agents de la GRC concernés agissaient sous le nom de code d'Opération Déception. Par son efficacité, sa tension ou l'interprétation (de Marc-Antoine Pilon, plus habitué au cinéma de Xavier Dolan, au revenant Josh Hartnett)  Suspect Numéro 1 aurait pu lui être baptisé : opération victoire.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver RUSH (Un autre récit d'infiltration policière dans le milieu narcotique.) ou encore FORCE MAJEURE (Comme Suspect N°1, le film de Pierre Jolivet a pour toile de fond une incarcération, liée à la drogue, d'un étranger dans une prison thaïlandaise).

Au Canada, le véritable protagoniste de l'affaire Olivier a longtemps été Victor Malarek, le journaliste qui a enquêté sur le cas du toxicomane injustement incarcéré, pour découvrir qu'il avait été le jouet de la GRC. Un fait d'armes de plus pour Malarek, qui avait fini lui même par faire l'objet d'un film consacré à ses méthodes peu orthodoxes d'investigation. 

Daniel Roby a découvert l'histoire d'Alain Olivier près de dix ans après la parution du livre-enquête de Malarek, mais n'a dès lors cessé de monter une adaptation au cinéma. Pas tant pour revenir sur le parcours du prisonnier malgré lui, mais pour explorer la part politique de ce cas. Pour le réalisateur, Suspect N°1 est avant tout lié à la manière dont la démocratie est à la fois menacée par des méthodes jusque là insoupçonnées au sein de la police canadienne et protégée par le travail de la presse, jonglant-il lui aussi avec les limites de la légalité. 

Roby aura vu dans ce projet une suite logique à son travail sur la société canadienne, après Funkytown, film inspiré d'une autre affaire trouble, autour d'un animateur de radio accusé d'un crime au début des années 80 et Louis Cyr, biopic d'un célèbre phénomène de foire ayant dissimulé à son public son analphabétisme et une grave maladie. Avec Suspect numéro 1, il trouvait de quoi affiner cette thématique récurrente autour des apparences et du poids du regard social ou des institutions. Jusqu'à ne pas masquer son ambition : aller sur le terrain des vrais-faux films policiers de Michael Mann, ouvertement cité par le biais d'une bande-originale reprenant des chansons utilisées par Mann dans ses propres films.

C'est une agréable surprise. L'enquête est bien menée, ça dégoute vraiment des gouvernements (si seulement ce cas était particulier, mais les mensonges du gouvernement, peu importe le pays, sont assez communs), franchement ça énerve, mais comme d'habitude, ce sont les innocents ...