SENTINELLE SUD

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Il n’est pas facile de revenir à la vie civile lorsqu’on a participé à un conflit. C’est sur ce thème que brode Mathieu Gérault pour Sentinelle Sud. Un soldat de retour en France après une mission tragique en Afghanistan se lance dans des trafics périlleux pour aider deux de ses frères d’armes survivants. Il prend des risques insensés par loyauté envers ses camarades. Ils finiront par découvrir qu’ils ne connaissaient pas les vraies raisons qui ont coûté la vie à leurs compagnons et qui pourraient leur coûter cher à eux aussi.

On a vu Niels Schneider dans J’ai tué ma mère (2008) et Les Amours imaginaires (2010), deux films qui ont lancé la carrière de cet acteur franco-québécois. Il a remporté le César du meilleur espoir masculin pour Diamant noir d’Arthur Harari en 2016. Sofian Khammes a été découvert en 2018 dans Chouf de Karim Dridi et Le Monde est à toi de Romain Gavras. India Hair a fait ses premiers pas en 2011 dans Avant l’aube de Raphaël Jacoulot et Camille redouble de Noémie Lvovsky.

Mathieu Gérault signe ici son premier long-métrage.  Il s’était fait remarquer avec le court-métrage Hautes herbes, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs et primé dans plusieurs festivals. Sentinelle Sud lui permet d’évoquer le thème de la fraternité qui lui tient à cœur car il a été séparé de ses frères pendant son enfance. Le retour d’un soldat et sa mythologie lui semblait une bonne façon de traiter ce sujet de façon originale en se penchant également sur la notion de famille. Il a choisi de mélanger les genres - film de guerre, polar, chronique sociale - autour de ses héros.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver A BEAUTIFUL DAY (Joaquin Phoenix est impressionnant en vétéran entraîné dans un engrenage brutal sous la direction de Lynne Ramsay.) ou encore LE RETOUR (Hal Ashby offre un rôle éblouissant à Jon Voight face à Jane Fonda pour évoque le difficile retour d'un vétéran du Vietnam.).

Le réalisateur Mathieu Gérault déclare avoir puisé une partie de son inspiration dans le cinéma américain pour Sentinelle sud. Il a notamment pensé à Sidney Lumet pour la façon dont ce dernier mettait souvent en scène des antihéros charismatiques. Il a tenu à ce que l’action du film se déroule après le conflit. Niels Schneider a préparé son rôle en regardant des documentaires sur la guerre en Irak et notamment Of Men and War de Laurent Bécue-Renard. Il souhaitait comprendre comment de jeunes hommes peuvent s’engager dans l’armée puis revenir dans leur pays gravement traumatisés. Il s’est passionné pour le rôle de ce garçon qui découvre une autre forme de violence, plus discrète mais redoutable, à son retour du combat.

Avec le personnage du Père, le commandant joué par Denis Lavant, Mathieu Gérault a choisi d’explorer la relation d’emprise que ce dernier entretient avec le héros. Il a aussi voulu parler du trafic de l’opium en Afghanistan, un pays qui, selon ses dires, produit 80% de l’héroïne mondiale. Il s’est livré à des recherches poussées sur ce sujet avant de se lancer dans l’écriture du film. Cela lui a aussi permis de développer la psychologie des personnages, qui correspondent à d’authentiques profils de soldats. Il a souhaité porter un regard tendre sur eux comme sur les comédiens qui les incarnent.

La musique des frères Evgueni et Sacha Galperine joue un rôle puissant dans le film. On leur doit notamment les partitions de la série Baron noir mais aussi de Grâce à Dieu de François Ozon est de L’Evènement d’Audrey Diwan. Mathieu Gérault souhaitait que la musique accompagne le personnage de Niels Schneider comme « une sœur inquiète de son sort ». Le réalisateur estimait qu’ils les compositeurs étaient aussi doués pour les scènes intimistes que pour les séquences d’action.

Original sur le fond, maîtrisé et tendu du début à la fin, parfaitement interprété et captivant sur les sujets qu’il entreprend, ce premier film de Mathieu Gerault est une excellente surprise. Surtout, fait rare, on peut sans peine avancer que « Sentinelle sud » ne souffre ...

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