SENNA

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Avant de consacrer un long métrage documentaire au pilote automobile brésilien Ayrton Senna, mort à 34 ans sur le circuit d’Imola, en Italie, lors du Grand-Prix de Saint Marin, le cinéaste d’origine indienne, Asif Kapadia, né à Londres en 1972, avait déjà réalisé de nombreux courts métrages – des documentaires et des fictions – qui lui avaient valu d’innombrables récompenses internationales dont, en 1998, le deuxième prix de la Cinéfondation, l’organisme créé dans le cadre du Festival de Cannes, afin d’encourager une nouvelle et internationale génération de cinéastes.

Tout en poursuivant une brillante carrière de documentariste à la BBC, le jeune homme fait ses débuts de réalisateur de longs métrages de fiction en 2001, avec The Warrior, l’histoire d’un féodal et redoutable guerrier indien, décidé à ne plus faire la guerre. De nombreuses distinctions viendront, cette fois encore, récompenser et le film et son auteur. Entre autres : le prix du réalisateur le plus original et le plus imaginatif décerné par le British Film Institute et le Hitchcock d’or du festival de Dinard. Viendront ensuite, en 2006, The Return, un thriller fantastique avec Sarah Michelle Gellar et, en 2007, Far North, un huis clos arctique présenté à la Mostra de Venise.

C’est alors qu’il revient au documentaire, avec le portrait d’un petit garçon de Sao Paulo, devenu triple champion du monde de Formule 1 et que vous allez retrouver maintenant avec ses collègues – rivaux ou amis – parmi lesquels Alain Prost, bien sûr, mais aussi Jackie Stewart, Nelson Piquet, Nigel Mansell... j’en passe et des meilleurs.

Voici donc Senna, prix du meilleur documentaire au festival de Sundance 2011.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver FAITES LE MUR (2010) (Autre documentaire produit par James Gay-Rees. Ici, le « champion » c’est Banksy, l’artiste au pochoir.) ou encore GRAND PRIX (1966) (Quotidien de quatre pilotes automobiles. L’un d’eux (Yves Montand) mourra sur le circuit de Monza, un autre tombera amoureux de Françoise Hardy...).

C’est le producteur James Gay-Rees qui, le premier, eut l’idée d’un film documentaire retraçant l’ascension vertigineuse et la chute, tragique, d’Ayrton Senna, que son père avait côtoyé, au milieu des années 1980, alors qu’il travaillait pour une marque de tabac, sponsor du champion. « Mon père, se rappelle le producteur, rentrait de chaque course, en disant qu’Ayrton Senna avait quelque chose d’unique qui le démarquait des autres pilotes. »

C’est en mars 2006 que la famille de l’ancien champion, mort 12 ans auparavant, accepte de recevoir le producteur afin d’envisager la réalisation d’un documentaire. Ils se mettent d’accord, en décidant de ne pas se focaliser, uniquement, sur le coté dramatique et spectaculaire de la mort du jeune homme. La famille et le producteur voulaient donner à voir les différentes facettes de cet homme, vraiment, hors norme. La personnalité de Senna, alliée à son immense talent, était le véritable sujet du film.

C’est alors que James Gay-Rees entre en contact avec Asif Kapadia, diplômé du Royal College of Art de Londres et cinéaste multi-récompensé. Etranger au monde des courses automobiles, Kapadia accepte de bâtir son documentaire sur la personnalité du champion, dont il découvre, petit à petit, l’étonnante spiritualité. « Cet homme était un phénomène et son histoire est palpitante », dira-t-il, plus tard. Loin de signer un document pour spécialiste, Kapadia « épure » son film au maximum, pour que ceux qui ne connaissent pas Ayrton Senna ou qui n’aiment pas la Formule 1 comprennent le personnage et se laissent emporter par son histoire.

Comme vous l’avez remarqué, les nombreux témoignages sont restitués en voix off. Personne ne s’exprime face à la caméra ce qui, en plus de donner une vraie fluidité au film, laisse toute leur place aux images d’archives, dont l’extraordinaire richesse permit au réalisateur d’être très sélectif. A propos de l’archive étonnante, rapportant la (virile) discussion entre Senna et Jean-Marie Balestre – le tout puissant président de la Fédération Internationale du Sport Automobile –, Asif Kapadia dira : « C’est comme des dialogues de Ken Loach, en plein milieu d’un film d’action. »

En plus des vidéos trouvées sur Internet et des images en super 8, 16 et 35mm qui donnent au film un aspect « mosaïque », non seulement assumé mais voulu, Asif Kapadia a abordé ce  nouveau long métrage comme un film de fiction, avec des drames et des personnages réels. Remarquant que les documentaires recourent souvent à des procédés fictionnels alors que les fictions tentent de paraître réalistes, le cinéaste résolut de créer un nouveau genre qu’il baptisa « genre intermédiaire ».

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