LES FILLES D'OLFA

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Il y a Olfa et il y a ses filles. Les filles Chkhaoui. Deux qui débordent de vies, Eya et Tayssir, deux autres que l’on ne peut qu’imaginer car « elles ont été dévorées par le loup ». Ce loup qui a pris tellement de vies en matraquant de vidéos, en se servant de Dieu comme père ou comme excuse. Un loup nommé Daesh. Presque Palme d’or en 2023, Les Filles d’Olfa est un docu-fiction pudique où l’imagerie se mêle au réel. Où les protagonistes de leur vraie histoire se mélange à celle que l’on raconte, incarnée ici par de véritables actrices. Hend Sabri devient donc Olfa Hamrouni pour « les scènes trop dures ». Nour Karoui et Ichraq Matar sont Rahma et Ghofrane, les vraies « disparues ». Eya et Tayssir, elles, sont bien là, en elles-mêmes avec toute leur lumière.  

Avec pudeur, comme une interview améliorée et imagée, chacune raconte son histoire : celle qui les a fait grandir en Tunisie avant la révolution de 2011 et qui a vécu l’exil de ceux partis pour l’Etat Islamique. Mais c’est loin de n’être que ça, tant aussi, ce destin reste presque intégralement suggéré. Les Filles d’Olfa montre aussi bien l’amour maternel que sa dureté, les sourires du souvenir aux larmes de l’absence, de la colère à l’incompréhension. Un film pensé comme un fragment de vies brisées mais aussi remplies d’espoir et de joies. Les Filles d’Olfa interroge la violence - celle que l'on reproduit par essence ? On s'en interroge. C'était d'ailleurs l'ambition de Kaouther Ben Hania qui réussit, en mélangeant des couleurs sombres à la lumière des visages de ces femmes, à nous questionner. Comment en arrive-t-on à prendre un billet d’avion tout droit vers l’enfer ? Mais aussi, qu’est-ce que l’amour maternel au service d’hommes qui brisent, enferment et violent ? Grâce une technique cinématographique mélangeant personnages fictifs et réels et à l’aide d’une réalisation d’une délicatesse infinie, les filles d’Olfa ne quitteront plus vos mémoires. Un moment fait de rires francs et de larmes les plus sincères. Pas étonnant que le film ait décroché 4 prix au festival de Cannes en 2023. 

 
Dans le même genre vous pouvez trouver SOUS LES FIGUES (Car c'est un film où l'amour se découvre et que les lumières de la Tunisie habillent la salle) ou encore LES ÂMES PERDUES DE STÉPHANE MALTERRE ET GARANCE LE CAISNE (Les drames liés à l'actualité).

Qu’est-ce que l’amour d’une mère lorsque l’on en contemple sa violence comme son déchirement ? On ne sait pas bien quoi penser d’Olfa : une mère qui aime tant ses filles qu’elle reproduit sur elle la dureté dont elle s’est sortie. Une femme qui juge ce qui les animent mais qui est capable de remuer ciel, terre, institutions et médias pour retrouver ses filles embrigadées aux mains de l’Etat Islamique. C’est ce qu’interroge aussi les filles d’Olfa : y’a-t-il une violence générationnelle dont on peut difficilement se sortir ? « Pour elles, le seul moyen d'être libres, c’était d'emprunter cette voie », admet celle qui incarne Olfa, à Olfa - périlleux exercice cinématographique mais qui prend ici tout son sens.

Un film aussi sur le patriarcat qui enferme. Tous les hommes de la fille d’Olfa et ses filles sont d’ailleurs interprétés par un seul et même homme, Majd Mastoura. Comme si les hommes étaient une seule et même entité - parfois (souvent ?) monstrueuse. Ce qui est suggéré avec une telle délicatesse dans Les Filles d’Olfa qu'on ne voit plus, ensuite, que la lumière du visage d’Eya et de Tayssir, malgré ce qu’elles ont traversé. 

Cinématographiquement, les filles d’Olga est d'une originalité puissante. Le fait d’incarner des personnages bien réelles, eux-mêmes dans le film pour Olfa et les faire se rencontrer entre elles, aurait pu être périlleux mais fait s’accoucher ici une histoire pudique, des questionnements et surtout, beaucoup d’amour.

Faute de mieux, Les filles d'Olfa a été rangé sous l'étiquette de "documentaire". Ce qui n'est évidemment pas faux, puisque le film de Kaouther Ben Hania montre certaines des véritables protagonistes d'une histoire qui a ému la Tunisie, mais le ...

Par quel genre définir ce film ? Documentaire ? C'est peut-être un terme trop restreint pour cette œuvre. Disons que l'ensemble retrace l'histoire d'une famille tunisienne, composée d'une mère, Olfa, et de quatre filles. Les deux ainées de la sororie ayant "disparu" (euphémisme ...

Petit vent de fraicheur en Compétition à Cannes cette année, avec l’irruption de deux documentaires, genre bien trop peu représenté : aux côté du géant Wáng Bīng, Kaouther Ben Hania est venue poursuivre son cinéma féministe et vigoureux. Les filles d’Olfa revient ...