Des histoires de jouets qui s’animent, on en connaît quelques unes depuis Le Petit Soldat de plomb des contes d’Andersen jusqu’aux Toy Stories des studios Pixar, mais celle-ci, immortalisée par Walt Disney dans les années 40, reste sans doute un des mythes les plus puissants de l’univers enfantin. Une histoire dont la vocation édifiante n’est plus à démontrer entre le nez qui s’allonge et les oreilles d’âne qui poussent inopinément aux enfants qui s’avisent de mentir, de faire des bêtises ou pire, de croire qu’on peut vivre sans travailler ou sans aller à l’école.
Cette histoire, rappelons que nous la devons à Carlo Collodi, un écrivain toscan du XIXe et de son vrai nom, Lorenzini. Venu sur le tard à la littérature enfantine, c’est en 1883 qu’il a publié ‘les aventures d’une marionnette’ , oeuvre restée discrète jusqu’à ce que l’oncle Walt lui confère l’immortalité. Mais un pinocchio ne signifie pas pour autant une "marionnette": en toscan, c’est ainsi qu’on appelle les pignons du pin.
Alors s’il y a dans ce film quelques ellipses un peu cavalières, ou des impressions de coupures à la hache si vous préférez, c’est qu’il s’agit au départ d’une série télé composée de 5 épisodes d’une heure, condensés ici en un film de 2h20 et diffusée pour la première fois par la RAI en 1972. Tournée pour l’essentiel en Toscane ou dans le Lazio, la province de Rome, cette série a fait figure d’événement à l’époque puisqu’elle réunissait une brochette remarquable du gratin du cinéma italien.
Avec Luigi Comencini à la baguette, fort réputé depuis Pain, Amour & Fantaisie en 53, ou Le Commissaire en 62, et qui signera, en cette même année 72, peut-être son film le plus célèbre: L’Argent de la vieille, l’histoire d’une vieille milliardaire que des miséreux tentent de dépouiller par les cartes et dont l’étonnant casting mélange Alberto Sordi, Silvana Mangano, Bette Midler et Joseph Cotten.
Quant à Nino Manfredi, qui incarne ici Geppetto, il est lui aussi une des principales figures de cet âge d’or du cinéma social italien, noir et marrant, souvent à sketches, et régulièrement incarné par Alberto Sordi, Vittorio Gassman ou Ugo Tognazzi. Manfredi fut ainsi la tête d’affiche de films toujours recommandables comme Pain & Chocolat de Franco Brasati en 73, Nous nous sommes tant aimés et Affreux, Sales et Méchants, deux films d’Ettore Scola en 74 et 76.
Dans ce Pinocchio, on peut encore reconnaître en fée bleue Gina Lollobrigida, qui fut la Dalila de Samson et la tulipe de Fanfan; et l’acteur et réalisateur Vittorio De Sica en juge pour enfant.
Quant à la ritournelle qui est la signature la plus entêtante de ce film, elle a été composée par Fiorenzo Carpi, collaborateur régulier de Comencini et couronné d’un Donatello italien pour la musique d’Eugenio en 1980.