Quand la pandémie a plombé le marché sud-coréen, phénomène qui a duré des mois, beaucoup de productions locales ont été revendues aux plateformes type Netflix, telles que Space Sweepers, Night in Paradise ou The Call. Mais Ryoo Seung-wan n’a pas souhaité céder à ces sirènes et a tenu à ce que Escape From Mogadishu soit exploité en salles. Il a eu raison car il a réussi à séduire 3,5 millions de spectateurs coréens – un record de la période. Le cinéaste est un habitué des succès commerciaux, puisque ses précédents films ont été très lucratifs : en 2015, le film policier Veteran, jamais sorti en France, a cumulé 13,4 millions d’entrées en Corée – c’est le cinquième meilleur score pour un film sud-coréen ; en 2013, The Agent, film d’espionnage, a réuni 7,1 millions de spectateurs ; et le box-office de son film de guerre historique Battleship Island (2017) s’élève à 6,6 millions de tickets vendus.
Escape From Mogadishu est inspiré de faits réels, aussi extraordinaires soient-ils. Des faits qui, par ailleurs, n’étaient pas très connus, pas même en Corée du sud. Le réalisateur explique : « N’importe quel réalisateur, quand il entend une histoire aussi extrême et aussi dramatique, voit sa curiosité titillée. La situation dans laquelle se sont retrouvés ces gens a tout d’un film à gros suspense. La Corée est le seul pays divisé dans le monde désormais et ici, la guerre civile a eu cette particularité que Nord-coréens et Sud-coréens ont dû cohabiter. » Il nuance tout de même, précisant que le scénario du film « romance » un peu l’histoire réelle et la « synthétise » pour qu’elle puisse « tenir en deux heures ».
Escape From Mogadishu a été tourné au Maroc et c’est très rare que les productions cinématographiques coréennes organisent des prises de vue en dehors du territoire coréen. « Ce qui est difficile, c’est la barrière de la langue, explique Ryoo Seung-wan. Les Coréens se sont peu dispersés à travers le monde, les diasporas ne sont pas importantes. Or sur un tournage, la communication, c’est primordial. Mais au fil du tournage, finalement, ce problème de communication disparaît. Un tournage, c’est généralement des gens un peu rebelles, un peu bizarres, qui collaborent ; donc finalement, on surmonte toujours à un moment donné cette barrière de la langue. » Ryoo Seung-wan avait précédemment tourné en Europe, en Allemagne, son film d’espionnage, très Jason Bourne dans l’âme, The Agent. Là encore, il y racontait l’opposition entre Corée du nord et Corée du sud. Le réalisateur note : « Il est ironique que ces deux films, The Agent et Escape From Mogadishu, qui traitent du sujet de la division de la Corée, aient tous les deux été tournés en dehors de Corée. Finalement on porte un regard différent sur la séparation quand on est à l'étranger. Je réalise beaucoup plus que la Corée est séparée quand je suis à l'étranger. »