COMBIEN TU M'AIMES ?

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Au fait, c'est vrai, combien ça vaut l'amour ? Bertrand Blier s'amuse à répondre à cette délicate question en nous présentant cette fable moderne sur nos propres faiblesses et sur les concessions, voire les bassesses, que nous sommes parfois prêts à faire pour obtenir l'objet de notre désir.

François vient de gagner au loto, une grosse somme. Fasciné par Daniela, une prostituée qui travaille dans un bar de Pigalle, il lui propose 100 000 € par mois pour vivre avec lui jusqu'à ce qu'il n'ait plus d'argent. Daniela accepte. François est éperdu de bonheur. Mais François a le cœur un brin malade et trop d'émotion risque de lui être fatal. André, son ami toubib le met en garde mais François est prêt à tout pour garder Daniela, y compris à affronter son souteneur qui n'a pas l'intention de lui rendre sa liberté pour rien.

Daniela c'est la sublime Monica Bellucci à qui Bertrand Blier offre sans doute là son rôle le plus sensuel et le plus bouleversant. Et Bellucci-la-divine est formidablement à l'aise dans l'univers de Blier-le-farceur où se télescopent comme d'habitude les intrigues les plus absurdes, les plus incongrues, et les situations les plus triviales.

Avertissement tout de même aux hommes un peu fragiles du coeur : l'abus de Monica Bellucci peut se révéler extrêmement dangereux pour la santé.

 
Dans le même genre vous pouvez trouver IRMA LA DOUCE (BILLY WILDER - 1963) ou encore LA DÉROBADE (DANIEL DUVAL - 1979) .

Bertrand Blier commence sa carrière de cinéaste en 1963 avec un documentaire remarqué : Hitler, connais pas où il nous donne à voir un panel de jeune gens de cette génération qui vivra mai 68 puis il passe à la fiction en 1966 avec un court métrage intitulé La grimace où Bernard Haller et Jacques Perrin se donnent la réplique. En 1967, il écrit et réalise Si j'étais un espion où son père, Bernard Blier tient le premier rôle. Après avoir écrit pour Georges Lautner Laisse aller, c'est une valse en 1971, il écrit le script des Valseuses qu'il veut mettre en scène mais n'arrive pas à trouver le financement. Il en fait un bouquin qui caracole rapidement en tête des ventes. Grâce au succès du livre, il peut enfin monter le film et réaliser le triomphe que l'on sait.
Fort de ce carton critique et commercial il s'attelle à Calmos en 1976 où il donne libre court à ce qui sera sa marque de fabrique dans quasiment tout ses films : un mélange contradictoire entre un amour et une fascination immodérée pour la gente féminine et un côté phallocrate affirmé que ses personnages revendiquent tout au long de ses histoires.
Préparez vos mouchoirs en 1978 lui permet d'explorer et de dynamiter le triangle amoureux classique, puis vient Buffet froid en 1979 où son univers étrange et surréaliste touche un large public, Beau-père en 81 raconte une histoire d'amour quasi incestueuse sur un mode plus tendre où Patrick Dewaere fait une création particulièrement émouvante. En 1983 La femme de mon pote avec Coluche, Huppert et Lhermitte obtient un succès mitigé. En 84 il parvient dans Notre histoire à nous montrer un Alain Delon comme on ne l'avait jamais vu : fragile, pitoyable et attendrissant en amoureux transi de Nathalie Baye. Deux ans plus tard, il sort Tenue de soirée, variation nouvelle et originale sur le ménage à trois. En 1989, Trop belle pour toi met en concurrence Carole Bouquet et Josiane Balasko qui fait chavirer Gérard Depardieu. En 1990 il dirige pour la première fois Anouk Grinberg dans Merci la vie où elle partage l'affiche avec Charlotte Gainsbourg. Anouk Grinberg qui devient alors sa compagne va lui inspirer Un, deux, trois, soleil en 1993 puis Mon homme en 1996 où il aborde déjà le monde de la prostitution. Suivront Les acteurs en 2000 puis Les côtelettes adaptation à l'écran de la pièce qu'il avait écrite pour Philippe Noiret et Michel Bouquet.
En 2005, Combien tu m'aimes ? fait écho à Mon homme cité plus haut. En 2010, sort Le bruit des glaçons où Albert Dupontel interprète le rôle du cancer de Jean Dujardin. Bertrand Blier n'a pas fini de nous surprendre...

Au-delà des nombreuses créations des Inconnus, il m'a rarement été donné la possibilité de voir Bernard Campan évoluer au cinéma - sans ses comparses. Ce qui a pour résultat de rendre vaine la question suivante : comment refuser un film avec pour trio d'acteurs ...

Cela faisait fort longtemps que je n'avais pas vu un film de Blier et je constate avec bonheur que le plaisir est toujours aussi vif de retrouver cette mise en scène si spéciale, si particulière, inimitable, faite de choix étranges, notamment celui de concentrer les rayons ...

C'est du Blier tout craché, on aime ou on n'aime pas mais au moins ça a du style ! Ce conte poétique avec un doigt d'érotisme (sublime Monica Belluci !) ne raconte pas grand-chose, mais il le raconte bien avec un mélange de tendresse et de folie et surtout infiniment de respect ...