LE TROU (VERSION RESTAURÉE) en VOD
- De
- 1960
- 126 mn
Un jeune homme, Claude Gaspard, accusé d’une tentative de meurtre sur sa riche épouse, est détenu à la prison de la Santé. Affecté à une autre cellule, il se retrouve au sein d’un groupe de quatre détenus soudés par une forte entente : Manu Borelli, Géo Cassine, Vosselin dit « Monseigneur » et Roland Darbant . Sur les plans de ce dernier, ils ont décidé de s’évader en...
- Policier / Suspense
- France | Italie
- Tous publics
- VF - HD
1 MIN AVANT
Auteur de quelques succès populaires comme Touchez pas au grisbi qui relance la carrière de Gabin, venant de tourner Montparnasse 19 avec Gérard Philipe, Jacques Becker éprouvait un désir liberté avec un budget modeste et sans stars. Ce sera Le Trou, qui est aussi son dernier film, tourné entre juillet et octobre 1959, dans les studios de Jean-Pierre Melville. Très malade, l’auteur de Casque d’or a la force d’en finir le montage mais le film sort un mois après son décès, en mars 1960. Truffaut et Godard le saluent comme un chef-d’œuvre et Melville, dans un texte vibrant des Cahiers du Cinéma, le considère comme « le plus grand film français ». Aujourd’hui encore, il reste un classique du film noir, très éloigné des conventions du genre, sans complaisance commerciale et d’une intrigante richesse. FilmoTV est heureux de pouvoir vous en proposer aujourd’hui deux versions différentes.
Le Trou appartient à un sous-genre du film de gangster : le drame carcéral. Il s’inspire d’un authentique fait-divers : l’évasion ratée de cinq détenus de la prison de la Santé, en 1947, creusant pendant des semaines un tunnel pour rejoindre les égouts de Paris. L’un d’eux est José Giovanni, qui sera condamné à mort pour triple assassinat puis gracié. Il en fait son premier roman, publié en 1957 par Gallimard avec le parrainage de Roger Nimier. Becker en acquiert les droits, travaille avec Giovanni sur l’adaptation et les dialogues et l’accueille sur son plateau comme conseiller technique. Car il ne veut pas une épopée spectaculaire qui se soucierait peu de vraisemblance, mais une approche documentaire de la prison et des hommes qui la composent – gardiens comme prisonniers dont les faits et gestes quotidiens sont détaillés. En préparant le script avec Giovanni, Becker insiste sur la véracité à tous les niveaux, ne laissant rien aux conventions. Les dialogues ne font l’objet d’aucun traitement romanesque et sonnent juste, empruntant au langage familier. La promiscuité est montrée, pour la première fois peut-être au cinéma, avec un plan de Manu, de dos, en train d’uriner.
Autre élément primordial : le casting, composé d’inconnus. Certains font leurs premiers pas comme Philippe Leroy (dans le personnage inspiré par Giovanni). D’autres n’ont eu que des rôles très secondaires comme Marc Michel et Raymond Meunier. Michel Constantin, choisi pour sa gueule, est le capitaine de l’équipe de volley-ball dans laquelle joue le fils du cinéaste, le futur réalisateur Jean Becker. Tous sont exceptionnels de naturel, grâce à une direction précise de Becker qui n’hésite jamais à multiplier les prises pour obtenir ce qu’il veut. Et il y a Jean Keraudy, qui ouvre le film, affirmant que le film qui suit est sa propre histoire. Son personnage porte quasiment son vrai nom, Roland Darbant au lieu de Roland Barbat. Il fit partie de l’évasion ratée racontée par Giovanni. C’est un cambrioleur, maintes fois arrêté, surnommé le roi de l’évasion pour ses nombreuses cavales. Comme dans le film, il a conçu en 1947 l’évasion par le tunnel. Pour Becker, il ne joue pas mais revit toutes les attitudes, les gestes du prisonnier, ajoutant un crédit supplémentaire dont profitent tous ses partenaires. Becker exige cette vérité des autres postes. Rino Mondellini, le décorateur, construit des sols avec de vraies plaques de béton. Quand les acteurs quand ils creusent les parois avec une barre de métal, ils ne peuvent pas tricher. La bande-son refuse tout lyrisme musical et crée un univers claustrophobe fait des bruits quotidiens de la prison. Enfin, la mise en scène s’attache avec rigueur à cet hyperréalisme, filmant le plus souvent en temps réel, ou donnant cette illusion en gardant la longueur des plans. Cette volonté documentaire lui permet de saisir la folie de l’univers carcéral quand un gardien saccage avec professionnalisme tout le contenu d’un colis alimentaire, ou encore l’ennui dans les tâches répétitives, aussi bien des détenus que des gardiens. La description précise de Becker vient à se superposer aux gestes minutieux de ces hommes, comme d’ailleurs sa farouche volonté de tourner, malgré la maladie qui le condamne, trouve un écho évident dans ce scénario implacable.
Dans le même genre vous pouvez trouver UN PROPHÈTE (Presque cinquante ans après Jacques Becker, Jacques Audiard signe cet autre chef-d’oeuvre du film de prison français. Dans l'intervalle, la société et les criminels ont bien changé.) ou encore LES ÉVADÉS (Comme l'indique son titre, c'est l'histoire d'une évasion. C'est aussi une belle histoire d'amitié et le film préféré des utilisateurs du site IMDb.).